La vie si peu privée de Cecilia et Nicolas

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Pendant des heures et des heures, vendredi, on s'est demandé si la désignation d'Al Gore et des responsables du GIEC comme Prix Nobel de la Paix n'allait pas être éclipsée dans les médias français par l'annonce, évoquée de toutes parts depuis plusieurs jours, de la séparation entre Cécilia et Nicolas Sarkozy. L'affaire aurait dû être réglée depuis dimanche dernier, affirmaient en début de semaine plusieurs médias, mais elle aurait été retardée… parce qu'un blog annonçait justement vendredi dernier ce tremblement de terre politico-médiatico-people pour le surlendemain.

Pendant toute la semaine, tous les médias français (et beaucoup d'autres à l'étranger) ont préparé des pages spéciales pour être prêts le moment venu. Parmi les grands journaux nationaux édités à Paris, seul Libération a parlé de la chose à plusieurs reprises, l'air de ne pas vraiment y toucher, mais en relevant les rumeurs diffusées ici et là de manière officieuse. Ce vendredi encore, le site de Libé relayait une information parue dans l'Est Républicain, "généralement bien informé". Et d'expliquer que les deux époux n'ont plus été vus ensemble depuis le 14 juillet, à l'exception de quelques photos volées lors de leurs vacances aux Etats-Unis, pendant lesquelles la femme du Président français a feint (très mal, au demeurant) une "angine blanche" pour ne pas accompagner son mari au déjeuner organisé par la famille Bush, au grand complet pour l'occasion.

Certains parlent déjà d'une nouvelle dérive médiatique, et d'une preuve spectaculaire de la pipolisation croissante de la vie politique française. Je pense qu'ils ont tort. Ce dont il s'agit, en revanche, c'est d'une instrumentalisation manifeste et répétée par Nicolas Sarkozy des institutions dont il est par définition le premier responsable, au profit de sa vie privée. En d'autres mots, le Président français a utilisé, en permanence depuis son élection, sa fonction et les institutions de la République pour tenter, en vain fort probablement, de retenir son épouse au domicile conjugal.

Passent encore (et pourtant!) les déclarations énamourées du Président lors de discours publics et officiels, comme cet hommage à la beauté de Cecila lors de son allocution du 14 juillet, sur le perron de l'Elysée. On comprend donc mieux aujourd'hui la réaction de l'intéressée, lâchant à ses voisins un sonore "ce n'est pas la peine!". On veut croire d'autre part que l'envoi de Cécilia en Lybie, pour en ramener les infirmières bulgares et le médecin palestinien prisonniers depuis des années, ne devait rien à cette statégie sentimentale. Mais on se demande plus gravement si les décisions ou initiatives prises par Nicolas Sarkozy depuis son entrée à l'Elysée n'ont pas été, à un moment ou un autre, motivées par d'autres raisons que la raison d'Etat. En tout cas, le nouveau président, dont l'hyperactivité a été maintes fois évoquée, a visiblement vécu ces quelques mois dans l'obsession de ses affaires privées. N'a-t-il pas imprudemment confié, il y a quelques semaines, que son "seul problème, c'était Cécilia"?

Certains observateurs de la vie politique française redoutent même que l'activisme du Président en matière de justice ne soit pas étranger aux remous de sa vie sentimentale, et à son souci de promouvoir l'action de la ministre de la Justice, Rachida Dati, présentée comme "sa sœur" par Cécilia elle-même. Ne succombait-il pas, ainsi, à la pratique très traditionnelle d'une exacerbation de la jalousie destinée à retenir un être cher qui s'éloigne?

Rumeurs perfides? En tout cas, même les partisans acharnés du Président sont restés songeurs après que ce dernier eut qualifié de "petit pois, qui se ressemblent tous, sans saveur" les magistrats français houspillés par la très glamour Garde des Sceaux.

La vie privée d'un homme (ou d'une femme) public devrait appartenir à un domaine inviolable, fût-il, ou elle, le premier responsable d'un Etat. Privée, la vie personnelle de Nicolas Sarkozy ne l'est manifestement plus, pour peu qu'elle l'eût jamais été. Mais la faute lui en incombe de manière incontestable.
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L
Je ne voudrais pas sa place (inconfortable) pour tout l'or du monde!<br /> Bon dimanche.
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